mardi 21 juillet 2009

Ils sont là


Il y a plus de vingt ans, après avoir quitté la première madame neurone, je me suis exilé. En ces terres lointaines, je recevais parfois la visite de l'ainé. Avec comme pris à payer, l'insupportable déchirure de la séparation quand il me fallait le reconduire au terminus, à la gare, à l'aéroport.
Parfois, je n'étais pas seul de mon clan et après avoir partagé ces moments douloureux, j'ai écrit ce qui suit :
À Stéphanie, Antoine et Albert, tout ce qui me reste d'une journée de départ

 

Ils sont là
Si cruellement présents dans leur absence
Si loin des yeux
Si près du cœur

 

Ils sont là
Si proches de nous
Qu'il ne nous manque que leur chair
Pour les embrasser

 

Ils sont là
À chaque heure de chaque jour
Comme notre cœur qui bat
Et qu'on ne voit pas

 

Ils sont là
Liés à nous par des liens
Plus forts que le temps
Plus forts que les hommes et toutes leurs lois

 

Ils sont là
Ils sont là
Ils sont là
Partout, toujours, tout le temps?
Ils sont si terriblement là
Comme s'il était possible qu'on puisse les oublier
Comme si on pouvait craindre qu'ils puissent nous oublier
Ils sont là
Je te le répète mille fois
Alors dis-moi Albert, pourquoi tu pleures ?

 


 

lundi 20 juillet 2009

enfin ? oui, peut-être

Les sentiers qui nous mènent à aujourd'hui sont rarement prévisibles.
Je retourne, un peu, en enfance.
Je retrouve, intact, le plaisir d'écrire.
Les intentions plus ou moins avouées d'être publié, de plaire à l'ensemble des lecteurs potentiels, se sont envolées.
Écrire est avant tout (re)devenu un plaisir solitaire que je suis prêt à partager.
Sans concession.
Youppi !

la chute vers le haut

dimanche 19 juillet 2009

Robinson : premier chapitre, take II

Sous les flocons qui se précipitent à sa rencontre, Zoé savoure sa victoire sur la convoitise. Bien qu'elle ait échafaudé un plan fabuleux, dont un auteur consciencieux ne saurait révéler les détails, pour la subtiliser dans un grand magasin, Zoé a finalement opté pour acheter la robe dont elle avait envie. Pas une robe très chère, mais pour elle une folie sans précédent. Une robe spéciale dans laquelle elle se retrouve Alice au pays des merveilles, version noir et blanc. La robe est toute noire, sur sa peau si blanche. Et pour la première fois, une robe définitivement sexée qui souligne délicatement ses formes discrètes tout en masquant la navrante étroitesse de ses hanches. Pour elle, et pour elle seule, avoir le temps d'une soirée l'impression fugace de jouer à être femme. Parce que ses deux mecs le lui permettent. S'ils sont bien loin de partager son innocence, ils ont mérité sa confiance. N'entre pas sur son territoire qui veut. C'est elle qui les a invités à partager son antre. Pour des raisons pratiques mais aussi par atomes crochus. Deux rencontres improbables dans des circonstances pour le moins particulières avec des êtres tout aussi particuliers.

Daniel, rencontré dans une église où le prenant pour un prêtre elle lui avait demandé de la confesser. Une de ses marottes quand elle s'ennuie et a le goût de parler avec quelqu'un et de s'inventer un personnage dépravé. Ancien détenu, d'âge canonique, il pourrait même avoir soixante ans, bourru et presqu'aussi solitaire qu'elle. Il cuisine dans un refuge pour sans abri. Inutile de se demander à quoi il carbure. Zoé croit même qu'il ne carbure pas du tout.

Richard, rencontré dans le métro. Pour établir le contact, il a vomi sur elle. Perdu dans des vapeurs illicites, elle l'avait en quelque sorte recueilli comme un chat de gouttière. Presqu'aussi utile, mais une présence agréable, teinté d'un humour brillant. Gentil comme tout, mais tellement plus féminin qu'elle. Barman dans le village. D'une discrétion absolue. Zoé est convaincue que sous sa réserve apparente il mène une vie débridée mais elle ne dispose pas du moindre élément de preuve. Et surtout cela ne présente aucun intérêt.

Depuis le début de ce que l'on peut considérer comme leur vie commune, jamais personne d'autre que ces trois-là n'a franchi le seuil de la porte que ceux qui y sont venus pour effectuer une tâche reliée à leur fonction. Le sanctuaire n'est pas ouvert au public.

Un petit réveillon empreint de simplicité dans lequel chacun joue son rôle.

Zoé, hôtesse moderne et modèle, a mis la patte douce sur son maquillage qui ce soir n'a pas pour fonction d'éloigner mais de rapprocher.

Daniel aux fourneaux s'est vu octroyer un budget illimité et peut, pour une fois laisser exploser sa virtuosité et donner la pleine mesure de son talent.

Richard s'explose dans des cocktails dynamiques à faible teneur en alcool : il faut que les convives surnagent jusqu'au repas principal et aux deux fabuleuses bouteilles de vin qui figurent au programme.

Zoé est la seule à s'être préoccupée des coûts exorbitants de la soirée. Mais son côté écureuil a cédé devant la détermination de ses deux sbires qui ont même proposé d'assumer seuls les coûts du réveillon. Il faut dire que pour chacun d'entre eux, la fraction des revenus consacrée au logement est nettement sous la moyenne et que tout le monde profite amplement des arrangements convenus.

Un observateur, si sa présence avait été tolérée, aurait eu bien du mal à croire que ces trois-là ne se connaissaient pas quand l'année est née.

Les émotions l'emportent sur les apparats et chacun s'efforce d'oublier que la vie pourrait les séparer au moins aussi rapidement qu'elle les a réunis. Mais les nomades savent profiter de la douceur des liens qui les unissent sans se casser la tête avec l'avenir. Et Noël leur permet d'échanger leur amitié comme d'autres échangent des cadeaux et des vœux superficiels. Ce soir, ils sont une famille de trois. Et Zoé étincelle dans sa petite robe noire.



Dans un tout autre coin de la ville, Robinson avale stoïquement son potage et sa soirée.

La seule présence de son père suffit à l'éloigner de la notion même de plaisir. La corvée se déroule comme une corvée et malgré l'éclairage de circonstance, le réveillon ressemble à la veillée d'un mort. D'une morte, depuis longtemps incinérée, mais dont le souvenir a un goût de cendres vient finir de gâcher son repas.

samedi 18 juillet 2009

Domaines

Domaines
où les rois sont rois à force de solitude
de grimaces rendues par l’envers des miroirs
de projets qui se perdent en soirs d’attente
de silences accablants chassés à grands cris
Domaines
où s’échafaudent des printemps chaque matin
où chaque soir sèche sous les promesses
où les larmes ne vivent qu’à condition d’obscur
où les mains se tordent de déchirure profonde

Domaines maudits de poussière et de brume
Que de sourires et que de mains tendues
Que de patience et que de doux espoirs
La tête et le coeur ouverts pour enfoncer les portes
Par dedans et par dehors
Pour faire oublier les frontières

nouvelle version

Le chemin sera long et laborieux.
La nouvelle Zoé est extrêmement différente de celle de la première version et j'imagine qu'il en sera de même avec les autres personnages, particulièrement Robinson.
Si ce n'était de la scène finale que j'espère encore originale, je ne sais pas si j'aurais le goût de recommencer ces 300 quelques pages de texte. Et encore...

le nouveau manuscrit

jeudi 16 juillet 2009

Robinson : Prologue

PROLOGUE
Zoé, c’est l’image d’une éclipse pendant un coucher de soleil, quelque part au-dessus de la mer. De préférence sans témoin, ou du moins de témoins tellement discrets qu’on peut oublier leur présence sans le moindre effort.
Zoé, c’est un avènement unique. On peut la trouver belle, et elle pourrait l’être. L’allure filiforme et la taille d’un mannequin pour certains, la pâleur maladive et la maigreur extrême de l’anorexique pour d’autres. Les traits soulignés d’un noir épais sur un fond de blanc comme se maquillent les mimes. Noirs sont les cils, noires sont les lèvres, noirs sont les ongles de ses mains. Les cheveux longs, droits sans autre intervention que celle de la nature, noirs de leur plein gré. Une tête pour publicité de colorant mais sans l’ombre d’un artifice.
Ce qu’elle pourrait avoir de séduisant s’engouffre dans le gris de son regard et l’agressivité de ses yeux. Fluide dans ses gestes, féline dans sa démarche, elle parcourt son quotidien comme une extra-terrestre méfiante, semblant perpétuellement hésiter entre l’attaque et la défense, étrangère à la paix comme à la pacification. Rien de la fille que l’on recherche pour une aventure d’un soir ou pour partager sa vie. Seule jusqu’à la moelle. La conviction d’une virginité perpétuelle.
Son aspect rébarbatif tient à distance l’espèce humaine sans distinction de sexe, de race ou de religion. Seuls de jeunes enfants font brièvement fondre les reflets métalliques de ses yeux. Le plus souvent jusqu’à ce qu’ils se posent sur l’un ou l’autre de ses parents.
Ceux qui croient se reconnaître en elle, les punks, gothiques et toutes les autres appellations incontrôlées, c’est en feignant de les évangéliser qu’elle les écarte le plus souvent de son chemin. Elle garde en réserve une gamme complète de maladies indiscrètes pour les plus persistants. Finalement, elle atteint surtout son objectif d’isolement en minimisant ses contacts avec les autres. Ses principaux refuges, quand lui prend la fantaisie de sortir de son antre, sont les bibliothèques où elle lit beaucoup et les églises où elle ne prie pas du tout.
C’est dans son cerveau qu’elle retrouve ses couleurs. Son but ultime, celui d’éloigner les autres étant atteint, elle trouve sa vie intérieure plutôt confortable et se décrirait volontiers comme heureuse. Un petit boulot chez un disquaire indépendant à deux pas de chez elle, donc sans souci
de transport; un grand appartement qu’elle partage avec deux spécimens qui lui foutent une paix royale tout en réduisant les coûts à un niveau plus que raisonnable; un accès partagé et illimité au réseau internet, où elle passe toutes les heures qu’elle pourrait consacrer à l’ennui, avec l’avantage surréaliste de l’anonymat intégral. Même la bouffe ne pose aucun problème, Daniel un de ses colocataires étant cuisinier, il y a toujours quelque chose de disponible au frigo ou au congélateur. Et elle mange si peu. Pas pour succomber à une quelconque mode ou par souci de son apparence mais pour la simple raison que les privations antérieures ont complètement détruit un appétit qu’elle n’a jamais cherché à reconstruire. D’autant plus que cette frugalité a un effet secondaire qu’elle apprécie à sa juste valeur : elle a interrompu son cycle menstruel. Encore un problème de réglé et encore des sous économisés. Parce que c’est son talon d’Achille, madame est économe. Son compte en banque, c’est un peu comme sa doudou. Le petit cochon a remplacé l’ours de peluche.
Bien sûr, sous les couvertures se cache une réalité dont les apparences ne sont qu’un pâle reflet.
D’abord une naissance dramatique comme chaque fois qu’un accouchement tourne mal. Embolie de liquide amniotique. Le bloc opératoire avec deux équipes, celle des anesthésistes cherchant à sauver la mère au moins assez longtemps pour qu’on puisse sauver l’enfant que les obstétriciens se hâtaient de retirer de ce sein devenu inhospitalier.
Une enfance sans histoire chez une tante maternelle dans tous les sens du mot, jusqu’à ce qu’un cancer du sein ne vienne la réclamer à son tour.
Puis un retour à la maison paternelle partagée avec deux soeurs qu’elle ne connait pratiquement pas et qui ne manifestèrent jamais le moindre intérêt pour la petite nouvelle soudainement apparue portant le souvenir d’une mère amèrement regrettée, une belle-mère marâtre avec ses deux filles issues de Cendrillon.
Une indiscrétion va la sauver. Elle lit, en cachette évidemment, le journal personnel de la plus jeune des ses soeurs pour y apprendre que comme pour l’ainée, le père avait réservé un cadeau plutôt inhabituel pour souligner leurs treize ans : un cours accéléré d’éducation sexuelle, travaux pratiques à l’appui.
Zoé n’a plus qu’un but : planifier à temps une retraite stratégique sans trop attendre le dernier moment, le bonhomme pouvant décider en tout moment de la célébrer d’avance.
Malheureusement, s’enfuir de la maison à douze ans, tout en voulant à tout prix éviter la drogue et la prostitution n’a rien de bien évident.
La solution la plus simple aurait été de s’enrôler dans l’armée ou dans une communauté religieuse, deux options interdites par son âge. Chercher refuge auprès d’un autre membre de la famille a aussi été une hypothèse rapidement exclue, parce qu’elle en connaissait peu les membres et qu’elle savait très bien ne pouvoir s’y fier.
Éprise par un besoin chaque jour plus pressant de partir à l’aventure ou du moins de changer d’air, elle traînait souvent au terminus d’autobus où elle étudiait inlassablement les horaires de départ. Or, c’est à celui des arrivées que devait se régler son destin, du moins celui des prochaines années.
Une vieille dame, des lunettes noires, une canne blanche. Un mélange de destin, de bon coeur et d’intuition l’amène à lui adresser la parole.
- Bonjour madame, est-ce que je peux vous aider ?
- M’aider à quoi ?
- Je ne sais pas, à porter vos choses, à trouver votre chemin.
- Voyez-vous ça, c’est tout jeune et ça veut aider une veille aveugle. Tu espères que je vais te donner des sous ?
- Non ! Euh… oui peut-être, mais même si vous n’avez pas d’argent, je veux bien vous aider quand même.
- Et bien, j’ai de l’argent mais je n’ai pas besoin d’aide. J’attends mon neveu.
- Je peux toujours vous aider à attendre et je vous promets que ça ne vous coûtera rien.
Le neveu ne s’est jamais présenté. Un nouveau contact venait de se créer et durerait un peu plus de six ans. Laurette venait d’hériter de l’appartement de son frère et avait fini par décider qu’il valait mieux être seule en ville que de l’être à la campagne. La rencontre avec Zoé serait pour elle aussi un incroyable coup de chance, la dernière note agréable d’une vie ordinaire où toute lumière passait par les oreilles.
Zoé s’occuperait des courses, d’un ménage sommaire pour une patronne peu exigeante sauf pour tout ce qui touchait à l’olfaction. De son mieux, elle s’appliquerait à faire la cuisine, ce qui dans son cas consistait essentiellement à réchauffer des conserves ou des plats pré-cuisinés et le thé ou le café selon l’heure de la journée. Dès le début, elle avait commencé à chiper des sous à la vieille, mais toujours avec la même modération qui fit que même si Laurette a toujours soupçonné la chose, elle n’a jamais ressenti le besoin de le mentionner. Par contre, elle avait pris bien soin de la mentionner dans son testament, lui léguant l’ensemble de ses avoirs dont le fabuleux appartement. Et aucun membre d’une famille dont elle ne connaissait strictement personne n’était venu s’opposer à la succession.
C’est ainsi que Zoé était devenue propriétaire d’un appartement qu’elle partage aujourd’hui avec deux drôles de moineaux avec qui nous la retrouvons en cette veille de Noël

Vraiment génial

Et en plus je ne sais même pas comment j'ai fait.
Mais quand même il y a maintenant un abonné fidèle à ce blogue et c'est moi. Alors je me le promets formellement, je ne me quitterai qu'avec mon dernier souffle.

l'abonné fidèle

mercredi 15 juillet 2009

Hors des sentiers battus

Je n'ai pas décidé de ce qu'il adviendra de "Robinson aurait-il cru Zoé ?" et des poèmes que je retrouve dans ma vielle boîte à souvenirs.
Mais ce n'est qu'ici qu'ils reprendront vie ou qu'ils mourront de leur belle mort. Finalement, je réalise qu'ils n'ont pas leur place sur quelqu'autre de mes blogues.

le matin de la résurrection