mardi 25 août 2009

La nuit de noces

La nuit de noces
Robinson n’a pas l’habitude de l’abstinence.
Passer la nuit dans la même chambre qu’une femme sans lui toucher est pour lui de l’inédit. Il est bien déçu de ne pas pouvoir consommer son mariage et se retient de violer leur entente.
Zoé a l’habitude de l’abstinence.
En fait, elle a honte de sa virginité. Elle se sent bien innocente dans la chambre d’un mari aussi expérimenté. Elle est très heureuse de ne pas avoir à consommer son mariage et se demande anxieusement comment révéler la réalité à son conjoint.
D’un commun accord, ils portent des tenues d’une grande sobriété. En vertu du même accord, ils se tiennent à bonne distance dans l’immense suite dont ils disposent mais qui n’a toutefois qu’un seul lit aussi grand soit-il.
En fait, ils se parlent beaucoup mais se regardent peu. Le partage de cette priorité augure bien pour la suite des évènements.
*
La première question qu’ils abordent est celle du pourquoi de ce mariage. Et heureusement, tous les deux décident de jouer franc-jeu.
Zoé s’exprime la première :
« Je me suis dis que je n’avais rien à perdre.
Si ça marche, je gagne un compagnon avec lequel je pourrai finir mes jours sans avoir à me soucier de solitude. J’aurai la chance de vivre une vie d’un luxe dont je ne connais rien, que je n’imagine même pas, dont en fait, je n’ai jamais rêvé. Si nous devions avoir des enfants, je pourrais leur assurer tout ce dont ils pourraient avoir besoin.
Si ça échoue, je retournerai à une vie qui me satisfaisait et qui continuerait de me satisfaire si je devais y retourner, plus riche d’une nouvelle expérience et je l’admets d’une éventuelle prime de séparation. C’est donc une aventure où je n’aurais rien perdu sauf, peut-être, ma virginité. »
Zoé rougit. Robinson blanchit.
Elle n’avait pas prémédité cet aveu.
Il n’avait pas envisagé cette éventualité.
Elle éprouve un mélange de gêne et de satisfaction.
Il éprouve un mélange de doute et de stupéfaction.
Elle se dit : il va me prendre pour une pucelle complètement déphasée.
Il se dit : elle n’a aucune raison de me mentir et j’ai toutes les raisons de la croire.
Suit une période de silence, chacun étant plongé dans ses réflexions.
Robinson émerge le premier et prend la parole :
« Je me suis aussi dit que je n’avais rien à perdre mais tout à gagner.
Si ça marche, je gagne une compagne avec laquelle je pourrai finir mes jours sans avoir à me soucier du visage de celle que l’on me jette en pâture à chaque soir.
Le mariage m’ouvre les portes d’une vie professionnelle à laquelle j’aspire depuis des années. Mon père n’a plus de raison de me maintenir dans ma condition actuelle. Je n’entrevois que deux possibilités : un voyage de noces de trois ans ou une entrée anticipée sur le marché du travail. Dans un cas comme dans l’autre, j’en retire une nette amélioration de ma qualité de vie.
Quant à un échec, j’aime mieux ne pas trop l’envisager mais mes gains sur le plan professionnels seront vraisemblablement permanents. Sinon, je me remarie dans le mois ! »
*
Ils se sont couchés en se saluant poliment. Se donner la main eût été grotesque et l’un comme l’autre n’auraient été confortables de se faire une simple bise.
Robinson, manifestement l’âme en paix, s’est endormi en une fraction de seconde. Il dort sur le dos et Zoé doit tendre l’oreille pour percevoir le bruit discret de sa respiration. Malgré la lumière tamisée, Zoé étudie le
visage de celui qu’il lui faudra bien apprendre à appeler son conjoint. La détente du sommeil souligne la délicatesse de ses traits. Sans cette barbe naissante dont elle se plait à imaginer la rugosité, il aurait même un côté enfantin. Elle s’avoue qu’elle aurait pu tomber sur bien pire mais pas sur bien mieux.
Quand le sommeil finit par la gagner à son tour, elle est beaucoup plus proche de son mari qu’elle ne l’avait prévu.
*
Si la nuit porte parfois conseil, Zoé découvre qu’elle peut aussi véhiculer de l’information.
Un rappel : tout le monde bouge pendant son sommeil.
Et une révélation : les hommes ont une érection matinale.
Elle s’éloigne tout doucement pour ne pas éveiller l’homme ni stimuler la bête

3 commentaires:

  1. "Zoé rougit. Robinson blanchit." hihi ! Moi non plus je ne m'y attendais pas, j'ai verdit :)

    Le récit prend une autre dimension avec le jugement de l'autre Robinson, Robinson "curiosité". 5 millions !

    Évidemment, étant une rainette libidineuse, j'ai commencé par ce chapitre, puisque tu as écrit que c'était un peu mélangé.

    Pour le reste je vais suivre l'ordre, je suis un peu perdue là. En plus que je ne pouvais imaginer que ce n'est pas une vraie nuit de noces, ou si peu !

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  2. Je n'attendais pas moins de mon lectorat en délire. Il n'y a rien comme la perspective d'une scène de sexe pour attirer le bon peuple.

    la préservation de la pudeur

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  3. et moi je suis vraiment représentative du bon peuple


    ta public en délire

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